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plaisir d'écrire - Page 140

  • Le bonhomme Misère (2)

    Extrait du livre de Henry Carnoy <<Les contes de Picardie>>


    Depuis ce jour, ce fut comme un fait exprès, il ne passa plus que de loin en loin un voyageur par le carrefour, et bientôt le bonhomme Misère se vit à la veille de mourrir de faim avec son chien Pauvreté, à qui il ne restait plus que les os et la peau.
    Le diable eut vent de ce qui se passait et vint un jour frapper à la porte du bonhomme Misère.
     ---Que veut-tu ? lui demanda ce dernier.
     ---Bonhomme Misère, je sais que tu n'as pas mangé depuis trois jours et qu'un peu d'argent dans ton escarcelle ne te nuirait pas trop. Je viens t'offrir dis mille écus, à une condition, toute-fois...
     ---Que je te donnerai mon âme ?
     ---Juste ! Que tu me donneras ton âme dans dix ans, si a cette époque il est impossible pour toi de me rembourser.
     ---C'est convenu, c'est convenu. Où est l'argent
     ---Le voici ! Mais tu jures ?
     ---Je jure ! dit Misère qui avait son idée.

    Le diable, tout heureux, tira dix mille écus de sa poche et les donna au bonhomme Misère.
     ---Ha! ha! hi! hi! faisait le diable en s'éloignant.
     ---Ha! ha! hi! hi! faisait le bonhomme Misère.

    Pendant dix ans ce dernier mena une joyeuse vie, mangeant bien , buvant beaucoup , régalant ses amis , enfin fréquentant plus le cabaret que l'église. Jamais son chien Pauvreté n'avait fait meilleurs chère...

    Les dix ans venaient de s'écouler quand le diable revint au carrefour des deux routes pour emmener Misère en enfer. Au grand étonnement du démon, le forgeron était tout joyeux et dansait toutes sortes de pas tout autour de la forge , suivi par Pauvreté qui aboyait comme un enragé.
     ---Morbleu! Misère, tu me sembles bien joyeux !
     ---Et pourquoi pas ?
     ---Mais tu as donc dix mille écus a me rendre ?
     ---Dix mille écus ? Mais vous révez, notre maitre! J'en ai cent à peine ! Mais si vous venez pour me chercher, je suis tout disposé à vous suivreau fin fond de l'enfer, s'il le faut. Asseyez-vous un instant dans ce fauteuil et je suis a votre disposition. 
    Le diable s'assit dans le fauteuil. Et au bout d'un moment :
     ---Notre maître, venez-vous ? je suis prêt ! dit le forgeron.
    Le diable essaya de se lever, mais en vain. Ses efforts furent inutiles.
    Sans se presser, le bonhomme Misère prit une grosse barre de fer et se mit à en asséner des coups vigoureux sur la tête, sur les épaules, sur le dos du pauvre diable, qui hurlait, jurait et sacrait à faire trembler la maison. A la fin, voyant qu'il ne pouvait sortir de ce  maudit fauteuil, le démon pria le forgeron de le laisser aller.
     ---Me fais-tu remise de ma dette? Romps-tu le marché ?
     ---Oui, oui ! mais laisse-moi, je t'en prie !
     ---Jure-le !
     ---Je le jure !
     ---Alors, je te permets de t'en aller.
    Le diable, meurtri, s'enfuit par la cheminée de la forge en poussant des gémissements épouvantables.

    A  SUIVRE